Dieu est un pote à moi

Cyril Massarotto

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    29 août 2010

    Massarotto est un pote à moi

    Cher Cyril,

    Alors que butais avec une grâce sans pareille sur le rayon humour de ma librairie préférée, votre livre m’est tombé dessus : « Dieu est un pote à moi ». Quelle idée !

    « Je kiffe trop Dieu » ou encore « Dieu existe, je l’ai rencontré », voilà du titre super-vendeur. Mais « Dieu est un pote à moi », vraiment… C’est l’étiquette blanche « Sélection de Noël » qui a attiré mon attention. Qui avait bien pu coller ce sticker sur la couverture ? J’ai essayé de la décoller, mais c’est la couverture qui est venue à moi. Avec un gros trou dans la devanture, rien à voir avec le premier métier du héros, difficile de ne pas, en raison de mon sentiment de culpabilité très judéo-chrétien, de replacer le livre dans son rayonnage. Va pour ce livre, ce ne sera pas le dernier que j’achèterai par hasard ou coïncidence. Et puis le trou dans la couverture montre la première page du bouquin, « bien sûr que j’existe », dit Dieu. Ce ne serait pas un peu une tautologie, ça. Je parle donc j’existe, ou un truc du genre.

    Et puis cette comparaison avec Ophélie Winter, c’est un peu osé, non ? Passons, les voies de l’écrivain sont impénétrables. En l’an 0 après Dieu, la trame se met en place. C’est l’histoire d’un mec qui devient pote avec Dieu mais dont Dieu sait tout parce que c’est lui qui l’a créé. Pirouette, cacahuète. Dieu prend la mauvaise habitude d’apparaître à n’importe quel moment, dans n’importe quelle position, je vous en prie, dans n’importe quel accoutrement. Juste comme cela, juste pour voir son pote que l’on ne sait même pas comment il s’appelle sauf que c’est pas Judas, car lui il ne trahit pas ses amis. Et puis, va pour la vie. Le héros fait la rencontre d'une femme, Alice, youhou, dans un sex-shop. Elle est en thèse, il est en transe. Cela s’appelle la destinée. Ils sortent ensemble, commencent à s’aimer, se l’avouent, ont un enfant, c’est joli, elle meurt, c’est triste, et puis il n’arrive pas à l’oublier, s’occupe de son enfant qui grandit. Se noie dans le lit des femmes avant de se décider à passer le reste de sa vie tout seul. Et puis il meurt en l’an trente, le regard embué de noir alors que Léo, son fils, vient lui présenter sa petite-fille. Voilà venu le temps de la question fatidique. Il répond « oui », comme tous les hommes. Parce que cela en valait la peine, parce que cela lui aurait fait de la peine. « Dieu est un pote à moi » est un pote à moi.

    PS. Je vends un livre, état presque neuf. Un léger renfoncement sur la couverture cabossée. On peut voir à l’intérieur, grâce à ce judas d’opérette, non-déformant. Garantie sans mauvais œil. S’adresser à l’accueil.